Le « choc des savoirs ». C’est le nom de la réforme de l’Éducation nationale qui va impacter notre collège à la prochaine rentrée scolaire. Parmi les mesures phares, cette réforme impose aux collèges publics d’organiser les cours de français et de mathématiques en groupes de niveau pour les élèves de 6 ème et de 5ème en 2024, puis de 4ème et 3ème en 2025. Dans ces deux matières, les élèves seront classés selon leur niveau : faible, moyen, ou fort.
La nécessité de repenser l’école, dont le collège, est une évidence et les objectifs affichés « d’adapter les enseignements aux besoins des élèves » ou encore « de rehausser le niveau d’exigence et d’ambition pour tous les élèves » sont totalement louables. En revanche, la réponse apportée par cette réforme et les moyens qui y sont associés nous inquiètent profondément. La mise en œuvre des groupes de niveau pose des problèmes idéologiques,
pédagogiques et organisationnels qu’il nous semble important de partager avec vous. Les conséquences du tri des élèves et de leur assignation à un niveau sont multiples et catastrophiques à un âge où la pression psychologique commence à se faire ressentir : stigmatisation et découragement des élèves du groupe des faibles, auto-disqualification et perte de confiance en soi pour les plus fragiles, érosion de l’émulation, esprit de compétition
exacerbé pour les élèves les plus forts, pression sur les élèves du groupe des bons et risque de fragilisation des élèves plutôt moyens dans un groupe fort.
La réforme prévoit qu’un élève puisse passer d’un groupe à l’autre. Or les groupes seront contingentés et limités en place. Il sera donc très difficile de passer d’un groupe à l’autre, et les élèves seront globalement assignés à un groupe tout au long de l’année. Aucune étude ne démontre les bienfaits de la mise en place des groupes de niveau tels qu’on demande aux collèges de les mettre en œuvre. Dans ces conditions, comment permettre à un élève qui aura progressé de monter en niveau ? Comment rendre le rapport des élèves aux évaluations et aux notes plus apaisé ? Comment favoriser le dialogue famille/collège alors qu’une pression accrue des familles sur les enseignants et la direction sera inévitable ?
Avec cette organisation, le groupe classe perdra aussi de son sens. La cohésion de classe et les projets pédagogiques seront difficiles à mettre en œuvre puisque la classe sera éclatée. Or on sait que les élèves, et tout particulièrement les élèves de 6ème ont besoin de cette cohésion et de repères « affectifs » avec leurs camarades. Comment favoriser le bien-être et le vivre ensemble dans ces conditions ?
De plus, la mise en place de cette réforme entrainera la perte d’une heure supplémentaire de renforcement en maths et français ajoutée depuis l’an dernier pour les élèves de 6ème suite à la suppression de la technologie. Elle mettra fin à au volant d’heures supplémentaires accordées aux établissements pour leur donner la possibilité de faire travailler les élèves en demi-groupes dans d’autres matières (langues ou sciences expérimentales) ou de mener des projets spécifiques. Elle nécessitera le recrutement de professeurs supplémentaires alors même que la pénurie d’enseignants pose déjà de nombreux problèmes de remplacements, que la baisse des vocations est criante et que l’Éducation Nationale a déjà recours à des professeurs contractuels qui manquent de formation. Comment trouver les enseignants
additionnels et bien formés en mathématiques et français dont cette réforme a besoin ?
Du point de vue organisationnel, la mise en place de ces groupes de niveau constituera un véritable casse-tête pour constituer les emplois du temps. La mise en place des cours de français et maths en « barrettes » pour les élèves de 6ème et 5ème risque de provoquer des emplois du temps très aérés, obligeant tous les élèves à rester au collège entre 8h30 et 17h15, alors même qu’il n’y a pas suffisamment d’AED pour surveiller et pas suffisamment d’espaces
de permanence.
Ce sont les effectifs trop nombreux dans les classes qui génèrent des difficultés dans les apprentissages. Le tri des élèves organisé au collège n’est pas une solution. Il sonne le glas de l’inclusion, de la coopération et du vivre-ensemble. Ces groupes de niveau sont une véritable offensive idéologique contre l’école publique que nous souhaitons pour nos enfants et notre société, celle où l’on peut apprendre et progresser tous ensemble.
Si comme nous, vous vous inquiétez de la mise en place de ces groupes de niveau, ou si vous voulez plus d’information, nous vous invitons à nous rejoindre le mardi 30 avril 2024 à 19h30 au Foyer d’Occitanie 18 Av. d’Occitanie à Ramonville. Quelques professeurs du collège André Malraux de Ramonville vous détailleront les conséquences de cette réforme.